Atlas des espaces publics. Saint-Etienne, une ville laboratoire

Pichon Pascale - Herbert Fanny - Perdrix Alissone

PU SAINT ETIENN







Extrait

Extrait de l'introduction de Pascale Pichon Juin 2008, nous sommes réunis dans la maison drômoise de Bety Aligne, pour une journée de travail intensif à réaliser le bilan d'une nouvelle année de formation du master 2 «Espace public. Design, architecture, pratiques» que nous appelons familièrement le MEP. Dans cette hospitalité chaleureuse nous voici à imaginer la suite, un nouveau projet tout à la fois de recherche et de formation dans lequel nous pourrions impliquer nos collègues enseignants, praticiens et chercheurs et nos futurs étudiants. Notre petite équipe pluridisciplinaire chemine depuis l'origine du master dont trois d'entre nous ont été acteurs de sa création. Depuis quatre ans que des travaux d'étude sont réalisés de façon collective en prenant pour objet, un site, un quartier, une zone, des rues, des places et tant d'autres espaces publics majeurs ou mineurs de Saint-Étienne, depuis que des étudiants de sociologie conduisent leurs enquêtes sur site, les documents s'accumulent mais se perdent également car nous n'avons pas réussi à mettre en place un système de conservation efficace. Or, notre principe premier de considérer Saint-Étienne comme un laboratoire en plein air produit ses effets et en premier lieu celui d'une connaissance renouvelée et plus approfondie de la ville, de sa vie urbaine, des continuités et des discontinuités historiques qui traversent en profondeur le temps présent. Ces documents ne sont pas d'égale qualité, tant s'en faut, mais leur masse extravagante et leur assemblage modulable compose sous nos yeux de nouveaux paysages urbains, des inédits et surtout obligent à porter un autre regard - critique - sur la ville en mutation. Cela nous engage dans un projet au long cours. Le choix du terme «atlas» fait rapidement consensus sans doute à cause du sentiment de profusion des données déjà là et à venir, sans doute parce que nous considérons l'espace public stéphanois comme un ensemble de fragments qui forment une mosaïque dont on ne peut guère extrapoler la représentation achevée, et plus encore parce que l'on anticipe qu'une possible cartographie exposerait une matière singulière mais non moins générique, les qualités contemporaines de l'urbanité. Non pas une carte plane et dessinée mais une carte encombrée et inachevée. Celle-ci ne serait pas seulement composée de territoires ou de quartiers, de sites industriels en friches ou en activité, de lieux d'habitats anciens ou modernes mais soulignerait également des stratifications sociales historiquement constituées encore visibles et vécues à la manière des «régions morales», selon les termes proposés par ces observateurs privilégiés des mutations de leur ville qu'étaient les sociologues de l'École de Chicago. Ces quartiers résidentiels accueillaient les migrants des campagnes et des lointains pays, arrivés là pour travailler et vivre, et étaient composés de telle sorte que les habitants puissent compter sur des solidarités urbaines liées à leur attachement culturel. Néanmoins l'intégration et l'adaptation à l'explosion démographique de la grande ville conduisaient peu à peu ces nouveaux habitants à se déplacer, à franchir les limites de leur quartier, à s'inscrire dans des trajectoires résidentielles typiques, bref à devenir mobiles. Les frontières poreuses entre les strates et les zones, c'est aussi cela que porte le projet de l'Atlas des espaces publics, cette mise en visibilité de fragments assemblés, montrant le visage contemporain et historiquement construit de la ville de Saint-Étienne, ville des migrations née grâce à ses ressources énergétiques du sol et le travail inlassable de ses habitants dès la première révolution industrielle. La carte oui, mais peuplée et traversée; la carte telle qu'elle traduit les fluctuations de la vitalité des espaces publics, telle qu'elle en montre les usages et en soutient les tensions. Juin 2013, la ville de Saint-Étienne invite Francis Cuiller, urbaniste de renom. La conférence qu'il propose dans l'auditorium de la Cité du design à un public composé d'élus et de nombreux professionnels de l'analyse et du projet urbain s'intitule, «Faire la ville ordinaire». L'urbaniste étaye son propos sur l'exemple-phare de Bordeaux dont il a été l'un des maîtres d'ouvrage de la recomposition urbaine tout au long de ces quinze dernières années. Dans ce projet urbanistique ayant réussi à redonner son attractivité à la ville avec la reprise de la croissance démographique, ô combien significative pour la ville de Saint-Étienne en baisse de population depuis ces dernières décennies, la mobilité est proposée comme la clef d'entrée et le fil conducteur du projet urbain : «avoir une ville à portée de main». Mais cette idée n'est en rien simple à mettre en oeuvre.



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EAN
9782862726564
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