La Civilisation du coeur. Histoire du sentiment politique en France du XIIème au XIXème siècle

C'est au Moyen Age que s'enracine la coutume d'inhumer en plusieurs parties (c?ur, corps, entrailles) et plusieurs lieux la dépouille des personnes royales et de certains hauts personnages.
La séparation des c?urs royaux n'a rien d'anecdotique et apparaît à l'historien de la société et de l'Etat comme un puissant révélateur : c'est l'Etat même qui repose ainsi sur la gloire, produit et ambition du "noble c?ur" que celui du roi vient coiffer, contrôler, diriger (le paysan, soumis à des règles communautaires, ne saurait avoir de c?ur à lui seul...).
Au XVIe siècle, le c?ur du roi prend des dimensions solaires, et la "patrie" française se constitue dans son rayonnement. Le c?ur populaire politique naît par l'effet d'une culture de l'émotion, au cours de cérémonies prises en main par le pouvoir, sous l'influence aussi des dévotions au corps du Christ et au Sacré-C?ur.
Le XVIIe siècle est marqué par une crise des "valeurs cordiales" (la gloire, la cérémonie, le don), et le noble c?ur se tourne vers Dieu.
Au temps des Lumières, coexistent deux c?urs populaires face à un noble c?ur désemparé et à un c?ur royal impavide : c?ur de saint, c?ur de père assuré de faire le bonheur de ses sujets. Pour le premier de ces c?urs populaires, radical, un c?ur de roi n'est jamais innocent. Le second, chrétien, révérera sous la Révolution, dans l'aura du Sacré-C?ur, le c?ur de son roi martyr.