Reines d'Afrique. Le roman vrai des premières dames

Hugeux Vincent

PERRIN







Extrait



Extrait du prologue

Premières Dames aux premières loges

Elles suscitent, en Afrique comme ailleurs, en Afrique plus qu'ailleurs, louanges obséquieuses, rumeurs, ragots, fantasmes et sarcasmes. Elles inspirent aussi d'increvables clichés teintés d'un machisme au mieux désuet. A commencer par celui-ci : «Derrière un grand homme, il y a toujours une grande femme.» Pourquoi derrière, et non au côté, sinon devant, voire au-dessus ? Pas facile de vivre et d'exister à l'ombre du baobab national. Le fardeau, si doré soit-il, de la Première Dame serait-il plus lourd à charrier sur le continent noir que sous nos frimas ? Voire. Après tout, Valérie Trierweiler, ses tweets, ses tourments puis sa disgrâce, Caria Bruni-Sarkozy et son coûteux site auront déchaîné dans l'Hexagone d'ardentes polémiques. Mais l'enjeu s'avère d'une tout ampleur au sein des sociétés de l'aire subsaharienne, théâtre d'un séisme silencieux. Là-bas, les lignes bougent. Le beau sexe, va pour cet autre stéréotype, s'y taille cahin-caha un statut inédit. Hier maîtresse du foyer - l'âtre comme le noyau familial -, la femme investit de nouveaux espaces : les amphis, l'échiquier politique et l'arène des affaires, du microcrédit rural au business de haut vol. En creux, et par l'entremise de ses reines et de ses princesses, c'est l'Afrique - ou plutôt les Afriques - que nous auscultons. Un continent qui, entre la servitude d'hier, les élans d'aujourd'hui et les périls de demain, écrit enfin son histoire. Autant dire que l'épouse du «boss» ne saurait, sous peine d'archaïsme, jouer les potiches postcoloniales, pas plus que les clones tropicaux de Jackie Kennedy, pionnière de la planète people, ou a contrario d'Yvonne de Gaulle, incarnation de l'effacement.

La First Lady dans ses oeuvres

Modernité ambiguë, bien sûr. Atout coeur de la First Lady, la fondation caritative à spectre large ne fait au fond que ripoliner l'arsenal de la dame patronnesse, figure maternelle, voire thaumaturge, ainsi dotée d'une arme à double tranchant. Santé, éducation, secours aux indigents : si elles tendent à humaniser le présidentiel époux, les bonnes oeuvres de Madame dressent en creux l'inventaire des échecs de Monsieur et dessinent les contours de son incurie. Gare au syndrome du boomerang... Autre effet pervers : le risque de dévoyer le concept même de «société civile», nébuleuse subversive par nature dont il serait aisé d'annexer les champs de bataille avec les moyens de l'État. Que bâtit-on de durable sur de telles fondations ? A vrai dire pas grand-chose. Un signe : même si l'Ivoirienne Henriette Konan Bédié, dépossédée de son titre voilà quinze ans, persiste à la tête de son ONG Servir à réunir les fonds que requiert la construction d'un hôpital voué au traitement des affections rénales, l'ouvroir moderne survit rarement à l'abdication de son inspiratrice. «Comment utiliser à bon escient l'immense pouvoir dont jouissent nos First Ladies ? s'interroge la Libérienne Leymah Gbowee, colauréate du prix Nobel de la paix en 2011. Jusqu'alors, c'est un échec. Mais les torts sont partagés. Nous, militantes et activistes, n'avons pas su les mobiliser sur nos enjeux prioritaires. Et elles ont échoué à s'en emparer.»



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EAN
9782262040949
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