Proche-Orient psychanalyse d'un conflit

D'où vient l'étrangeté de ce conflit, qui l'empêche de trouver une solution "raisonnable" et le dérobe aux cadrages rationnels, aux approches ordinaires du genre: guerre de libération, partage d'une terre entre deux peuples, lutte anti-coloniale?? Même la composante religieuse, qui évoquerait un conflit originel entre islam et judaïsme, ne suffit pas à préciser les choses et risque plutôt de les brouiller sous l'étiquette de "guerre de religion"?
Daniel Sibony tente ici de faire la "psychanalyse d'un conflit" à partir de la pathologie propre à chacun des acteurs: 1/ celle du monde arabe et de sa pointe avancée, le peuple palestinien, chargé d'exprimer un refus originel d'Israël et pliant sous le poids de cette charge qui le sacrifie; 2/ le drame judéo israélien, où le peuple juif prend Israël pour "idéal" parfois décevant, pendant qu'Israël se donne, lui, comme idéal de couper ses attaches avec le drame juif millénaire; 3/ le témoin occidental lui aussi divisé, entre l'Amérique qui veut faire rentrer brutalement le monde arabo-musulman dans le jeu mondial, quitte à lui casser son fantasme unitaire, et l'Europe qui se bat avec ses propres fantasmes légalistes et gestionnaires.
Dans ce jeu complexe, la part de l'inconscient et du fantasme mérite d'être éclairée, car l'histoire semble s'être fixée l'enjeu étrange de résoudre là-bas ce qui ne se résout nulle part ailleurs, à savoir le partage de l'être et de l'existence, autrement dit l'ouverture au symbolique. Pour cet éclairage, Daniel Sibony fait jouer de façon neuve les dynamiques narcissiques et de retour du refoulé à travers deux concepts étonnamment productifs: la terre "hantée" ou "possédée", et l'empoignade entre-deux livres, la dispute pour un Texte sous le signe du plagiat ou de l'effacement de son auteur.