Renaître de ses hontes

Extrait du prologue

Le cri de la honte

Le cri de la honte, c'est le silence.
Philippe Gibout.

D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours eu honte.
Aujourd'hui, alors que j'ai franchi le cap de la quarantaine, j'ai décidé de raconter mon histoire et ce que j'en ai appris. Il est temps pour moi d'oser briser ce silence et de raconter un passé honteux que j'ai longtemps cru inacceptable, insupportable pour les autres et pour la société.
Je dis «croyais» parce que je n'avais pas encore compris que ce passé humiliant et honteux pouvait être transformé en une force, un élan positif, une pulsion de vie. Oui, on peut transformer sa propre honte et en faire une force de vie.
En relisant mon histoire, en revivant les douleurs par lesquelles je suis passée, j'ai compris que j'ai développé des qualités qui font ce que je suis désormais, et que je n'ai pas que des défauts, comme je l'ai longtemps pensé.
Il m'a fallu tout ce temps pour découvrir que j'ai puisé une immense richesse des événements douloureux de ma vie.
Je ne peux pas changer les autres, mais je peux me changer moi et changer le regard que je porte sur la vie. De cela, je suis responsable.
Je ne suis pas responsable d'avoir vécu une enfance et une adolescence douloureuses et violentes. Mais j'ai le pouvoir d'en guérir et d'en faire quelque chose de positif pour moi-même et pour les autres.

Pendant de nombreuses années, j'ai cherché le sens de la vie et de la souffrance. J'ai osé demander de l'aide et j'en ai beaucoup reçu. Aujourd'hui encore, j'en reçois beaucoup. C'est ainsi que j'ai pu travailler sur moi pour me comprendre et guérir de mes blessures. Comprendre mes parents, leur propre histoire et pourquoi ils m'avaient fait «ça», à moi, ce bébé, cette petite fille qui ne demandait qu'à être accueillie et aimée...
Longtemps, j'ai attendu comme une enfant que la vie me donne ce que j'estimais ne pas avoir reçu. J'ai nourri beaucoup de colère contre elle parce que je n'ai pas demandé à vivre dans la souffrance mes vingt premières années ni à en payer les conséquences à l'âge adulte. Il me manquait la maturité, la compréhension et la sagesse.