Le Pape doit mourir. Enquête sur la mort suspecte de Jean-Paul Ier

Yallop David - Gilbert Claude - Le Bris Caroline

NOUVEAU MONDE

Le chemin de RomeLa famille Luciani habitait le petit village de montagne de Canale d'Agordo à presque mille mètres d'altitude et environ 120 kilomètres au nord de Venise.A l'époque de la naissance d'Albino, le 17 octobre 1912, ses parents, Giovanni et Bortola, s'occupaient déjà de deux fillettes nées du premier mariage du père. Giovanni, jeune veuf avec deux fillettes et dépourvu d'un travail régulier, n'était pas précisément le rêve pour une jeune femme. Bortola avait envisagé d'entrer au couvent. Désormais, elle était mère de trois enfants. La naissance avait été longue et pénible, aussi Bortola, manifestant un surcroît d'inquiétude qui allait marquer l'enfance du garçonnet, craignait que l'enfant ne vive pas. On le baptisa sans tarder, du nom d'Albino, en souvenir d'un ami intime de son père tué dans un accident survenu dans un haut-fourneau en Allemagne tandis qu'il travaillait tout près de Giovanni. Le garçon arriva dans un monde qui, deux ans plus tard, allait entrer en guerre après l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand et de son épouse.Les quatorze premières années de ce siècle sont considérées par bien des Européens comme un âge d'or: «la Belle Époque». D'innombrables écrivains ont décrit la stabilité, le sentiment général de bien-être, l'accroissement partagé de la culture de masse, la vie spirituelle satisfaisante, l'élargissement des horizons et la réduction des inégalités sociales. Ils ont exalté la liberté de penser et la qualité de la vie comme si le monde était redevenu un jardin d'Éden. Il est certain que ce tableau idyllique n'est pas sans fondements; pourtant existaient aussi une pauvreté effrayante, un chômage massif, des inégalités sociales, la faim, la maladie et une mortalité précoce. Ces deux réalités partageaient la plus grande partie du monde en deux. L'Italie ne faisait pas exception.Naples était assiégée par des milliers de gens qui voulaient émigrer aux États-Unis, en Angleterre, n'importe où. Les États-Unis avaient déjà ajouté quelques restrictions discrètes à la déclaration «Envoyez-nous vos sans-foyer, vos affamés et vos malades. Vos foules enchaînées qui aspirent à la liberté.» Parmi les divers motifs de refus d'entrée aux États-Unis, les «indésirables» découvraient la maladie, l'insuffisance de fonds, la soumission au fermage, la criminalité et les malformations physiques.À Rome, on voyait depuis Saint-Pierre des milliers de malheureux vivre dans des huttes de paille et de branchages. En été, nombre d'entre eux allaient s'installer dans les grottes des collines environnantes. Certains travaillaient de l'aube au coucher du soleil dans les vignobles pour quatre sous par jour. D'autres travaillaient dans des fermes, sur la même base, sans recevoir d'argent du tout. On les payait d'ordinaire en nature, avec du mais pourri, une des raisons pour lesquelles autant de paysans souffraient de la pellagre. Debout dans les rizières de Pavie, de l'eau jusqu'à la taille, beaucoup attrapaient la malaria à cause des nombreux moustiques. Plus de la moitié était analphabète. Tandis que les papes, les uns après les autres, nourrissaient l'ardent désir de récupérer les États pontificaux, la réalité de la vie pour une large partie de ceux qui vivaient dans cette Italie unifiée restait misérable.

27,40 €
Disponible sur commande
EAN
9782847366068
Découvrez également sur ce thème nos catégories Histoire des religions , Orthodoxie , Protestantisme , Apparitions , Missels , Sacrements , Vie religieuse , Prières , Essais catholicisme , Vie des saints , Jésus , Lectures de la Bible , Bibles , Evangiles apocryphes , Histoire de l'Eglise dans la section Christianisme