Balade en Midi-Pyrénées. Aveyron, Lot, Tarn, Tarn-et-Garonne

Extrait de la préface de Dominique Reynié

Écritures souveraines

Dans un recueil, dans une encyclopédie ou dans un dictionnaire il n'y a jamais ni tout ni tout le monde. Certes, l'exhaustivité est impossible mais ce serait une piètre raison que d'invoquer cette évidence. Un recueil est un choix et l'exercice du choix est une manière de nous dire déjà quelque chose. Cela devient un geste d'écriture. L'idée de ces recueils est bien contenue dans un choix d'écrivains unis par une région - Midi-Pyrénées. Or, le choix raconte une région qui n'est pas seulement une terre de naissance mais aussi une terre de passage. C'est nous dire que si tous les poètes ici salués ne sont pas de ce pays, tous cependant lui doivent quelque chose et ce quelque chose, parfois confus comme une silhouette tremblante de brume, s'immisce dans l'atmosphère de leur art: humidité froide ou sécheresse accablante, ce sont des climats que l'on trouve au pays. Accueillir en ces recueils les écrivains de passage, c'est dire que ces lieux sont des terres d'aspiration. Devoir à sa terre est une obligation honorable mais contrainte, car nul n'a choisi son lieu de naissance. Mais devoir à une terre de passage, à une terre d'adoption est la marque d'une rencontre, d'une affection, d'une compréhension exceptionnelle. C'est une reconnaissance qui pouvait ne pas être. Le geste de ces volumes, l'un des gestes que l'on peut y deviner, dont on peut presque ressentir la force ou l'élan, est un hommage rendu à une terre irrésistible, de naissance ou de passage, à travers l'hommage rendu à des écrivains qui ont su s'en pénétrer, s'en inspirer ou plus simplement s'y attacher.
En un reflet supplémentaire, un peu comme dans ces jeux de miroirs que nous faisions enfants avec l'armoire de nos parents, la région Midi-Pyrénées. Elle est l'oeuvre de l'État et ses contours sont comme les lignes d'une autre écriture: pure création, oeuvre de l'esprit, un tracé à la surface du monde, qui assigne, distribue, détache un pays, en rattache un autre. La plume bureaucratique grimpe et redescend, partageant ou séparant terres, montagnes et vallées, pour finalement, en une typique arrogance d'arpenteur parisien, adresser à quelques villes, tant de villages et à tous leurs habitants une identité supplémentaire.