Souffrances et résistances des paysans français. Violences des politiques publiques de modernisation

Maladies physiques et mentales, accidents du travail, exclusion progressive des femmes, conflits au sein de la famille, éclatement du groupe, négation des savoirs traditionnels : les politiques incitatives de l'Etat et des organisations agricoles pour moderniser l'agriculture française depuis l'après-guerre se traduisent par des pathologies lourdes pour les paysans qui ont accepté de "jouer le jeu" de la modernisation. La vulgarisation scientifique et technique de la "science agronomique", les modèles productivistes uniformes de l'Etat et des organismes professionnels sont analysés dans leurs conséquences concrètes avec différents groupes : éleveurs de l'Ouest et de Lozère, maraîchers du littoral varois, bergers et chevriers du Verdon, des Pyrénées, du Millevaches, et "poly-agriculteurs" des Monts du Lyonnais, notamment. En s'appuyant sur de recherches "au long cours", des actions de formation et des interventions sociales "en réseau" sur différents territoires, Michèle Salmona analyse les facteurs économiques, culturels, affectifs et sociaux, des processus d'échec du collectif de travail ; elle présente également les expériences de certains groupes enracinés localement qui résistent à la violence des politiques publiques et mettent en oeuvre des solutions originales de développement Elle s'interroge aussi sur la place et le rôle du chercheur (anthropologue, ethnologue, psychosociologue...) face à des groupes en crise et revient sur les principes de la "recherche-action". Parallèlement, elle présente les phénomènes de ré-appropriation d'anciennes fêtes populaires qui permettent l'ouverture d'espaces publics nouveaux d'expression de la souffrance et de l'espérance.