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American stranger

Plante David ; Viallet Laurence

PLON





Extrait



Seule chez ses parents à Manhattan, Nancy se promenait nue. L'appartement était resté fermé tout le mois d'août, pendant son séjour avec eux à Amagansett, il était calme, sombre et chaud, ses vieux stores vert foncé presque descendus jusqu'au rebord de la fenêtre. Elle aimait la chaleur intérieure, la pénombre, le silence, elle aimait déambuler nue, le corps encore moite des vapeurs du bain et de transpiration, et elle aimait rester devant la fenêtre, le store levé, à regarder le monde extérieur.
Elle observait la circulation de la 5e Avenue et, par-delà, la masse arborée du parc, puis elle se retourna pour jeter un oeil dans le salon comme si elle risquait d'y trouver quelqu'un. La nudité, en soi, induisait une attente, quelqu'un d'autre. Le salon lui paraissait immense. Le parquet était nu, les tapis roulés et poussés contre un mur. À côté du divan et des fauteuils, deux chaises et une table Biedermeier étaient disposées en angle droit, leurs pieds élégants reflétés sur le parquet rutilant, au fond de la pièce, miroitant aussi sur le sol, se trouvait un autre meuble Biedermeier en cerisier, grand et étroit, orné de rosaces d'ébène sculptées le long d'un fronton soutenu par deux fines colonnes d'ébène. Nancy marchait pieds nus. Il flottait dans l'air une odeur de cire d'abeille mêlée à de vagues relents de naphtaline.
Elle alla dans sa chambre, où sa valise reposait ouverte sur la moquette et, à côté, des sacs venus des grands magasins qu'elle n'avait pas déballés et qui renfermaient toujours les vêtements qu'elle avait achetés. Elle s'étendit sur son lit défait dont le couvre-lit en satin blanc retombait jusqu'au pied. Croyant entendre un bruit sourd dans l'appartement, elle se raidit, l'oreille tendue. Cela ne se reproduisit pas, mais le silence semblait émettre un son particulier et, toujours immobile, elle l'écoutait. Lentement elle se leva pour enfiler la robe de chambre posée sur le dossier d'une chaise et, parcourue de légers frissons, elle sortit dans le couloir pour jeter un coup d'oeil dans la chambre de ses parents, certaine d'être seule. De retour dans sa chambre, elle resta assise un moment sur le bord du lit, sans bouger.
Sur la table de chevet se trouvait un téléphone blanc. Elle avait envie d'appeler quelqu'un, mais chaque fois qu'elle songeait à appeler une de ses connaissances, elle se disait non, pas lui. Elle appela sa mère à Amagansett.
De sa voix grave, celle-ci dit :
- Promets-moi de faire attention au volant quand tu rentreras à Boston.
- Je conduirai prudemment, mais à toute vitesse. Sa mère répondit :
- Oui.
Et elle poussa un léger soupir.
Elle quitta à nouveau sa chambre pour se promener dans l'appartement, à la recherche de quelqu'un qui, elle le savait, ne s'y trouvait pas. Elle savait aussi qu'elle était ainsi constamment à la recherche de ce qu'elle ne trouvait pas.






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EAN
9782259212915
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