Comment aimer son maître quand on est un chat ; Comment domertiquer son maître quand on est un chat

1 - L'AMOUR TOUJOURS

Encore plus que la cigarette, ses ongles ou un verre, l'homme a perpétuellement l'amour à la bouche. Il l'a dans plusieurs autres parties de son anatomie, dont le sexe et le coeur. Et la tête. Le sang aussi, en cherchant bien. Et la peau. Démêler une pelote de laine, à côté de comprendre l'amour, c'est facile.

L'amour dans la peau
L'homme parle tout le temps d'amour, courtois ou pornographique. C'est l'un des thèmes cardinaux de sa vie quotidienne, de sa vie rêvée et des films qu'il regarde le samedi soir. L'homme est obnubilé par l'amour, il l'a dans le cerveau et appelle cela «dans la peau». Il y pense tout le temps, ses neurones s'agitent comme des sémaphores et envoient des signaux forts. Quand il y pense trop, il jure qu'il a l'amour dans le sang comme si c'était une maladie. Du sang au coeur, il n'y a qu'un pas et quelques globules, l'homme est amoureux, ses pupilles sont en forme de coeur comme les lunettes de Lolita, il voit la vie en rose et en niais (et il nous propose miettes de thon et filets de poulet à foison). Il pourrait marcher sur l'eau tellement il plane. En lieu de quoi, il prend une douche (pas toujours) et fonce droit au but, il a l'amour dans le sexe et nulle part ailleurs.

L'amour à la pelle
Aujourd'hui, quand l'homme a mal, ses docteurs lui suggèrent de noter sa douleur de 0 à 10. Quand l'homme aime, il arrache une par une les pétales d'une marguerite en marmonnant une comptine: je t'aime un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout.
L'amour humain compte quatre degrés, soit six de moins que la douleur. Le «pas du tout» compte pour du beurre, ce n'est plus de l'amour, mais du désamour (et probablement de la souffrance). L'homme aime en tranches larges et souffre par petits paliers. Le rapport entre amour et souffrance n'a rien d'innocent, l'amour est aussi sa première source de souffrance. Si le rythme de l'amour est à quatre temps, son champ est infini. L'homme aime tout et le reste. Bien qu'il fasse le distinguo entre l'amour et l'amitié, entre l'amour charnel et l'amour chaste, le fait est qu'il aime sa soeur et sa femme, son boucher et les pâtés du charcutier, sa voiture et ses livres, sa maison et son oreiller. L'homme aime tant, plus, trop, c'est la folie. Quand il dit «aimer bien», méfiance, il frôle l'insulte.