Les confessions de Mr Harrison

Gaskell Elizabeth ; Vierne Béatrice

L'HERNE

Le feu brûlait allègrement. Ma femme venait de monter à l'étage mettre Bébé au lit. Charles était assis en face de moi, plus joli garçon que jamais sous son hâle. Il était bien agréable de nous dire que nous étions sûrs de passer quelques semaines sous le même toit, ce qui ne nous était pas arrivé depuis l'enfance. Me sentant trop paresseux pour bavarder, je grignotais des noix, sans quitter les flammes des yeux. Mais Charles ne tarda pas à s'agiter.«Will, profite donc du fait que ta femme est montée pour me confier ce que je brûle d'envie de te demander depuis que je l'ai vue ce matin. Raconte-moi comment tu t'y es pris pour gagner son coeur. Je veux la recette qui me permettra d'avoir, moi aussi, une petite épouse aussi exquise que la tienne. Tu ne m'as révélé dans tes lettres que le strict minimum. Alors, vas-y, mon garçon, ne m'épargne aucun détail.- Si je te dis tout, mon récit n'en finira pas.- Ne t'inquiète pas. S'il me fatigue, je peux toujours piquer un petit somme et rêver que je suis de retour à Ceylan, célibataire esseulé, puis me réveiller, dès que tu auras fini, pour m'apercevoir que je suis bel et bien sous ton toit. Allez, en avant, mon gaillard! «Il était une fois un fringant jeune homme à marier...» Tiens, voilà un début prometteur!- Fort bien. «Il était une fois un fringant jeune homme à marier... qui se demandait où diable il allait bien pouvoir s'établir, lorsqu'il aurait terminé ses études de médecine - non, non, il faut que je parle à la première personne; je ne parviens pas à me mettre dans la peau du fringant jeune homme.»Quand tu es parti à Ceylan, je venais de finir mon internat et tu te rappelleras peut-être que je voulais, comme toi, voyager à l'étranger; j'ai donc songé à solliciter un poste de médecin de bord sur un navire, mais je me suis aperçu que je courais alors le risque de me déconsidérer dans ma profession; cela m'a fait hésiter et, pendant que j'atermoyais ainsi, j'ai reçu une lettre du cousin de mon père, Mr Morgan, le vieux monsieur qui avait coutume d'écrire à ma mère de si longues lettres emplies d'excellents conseils et qui m'avait fait parvenir un billet de cinq livres, lorsque j'avais accepté de m'engager comme apprenti médecin chez Mr Howard, plutôt que de partir en mer. Or, Mr Morgan, à ce qu'il semble, avait eu dès le début l'intention de faire de moi son associé, si je me montrais à la hauteur de ses espérances; et comme il avait reçu à mon sujet un rapport tout à fait favorable d'un de ses vieux amis qui exerçait la médecine au Guy's Hospital, il m'écrivait pour me faire la proposition que voici: si j'acceptais de travailler à ses côtés, je recevrais un tiers des revenus de sa pratique pendant cinq ans, puis la moitié et, pour finir, je lui succéderais entièrement. Ce n'était pas une offre négligeable pour le jeune homme sans le sou que j'étais, car Mr Morgan avait une fort belle clientèle de province et, bien que je ne le connusse pas en personne, je m'étais fait de lui une idée assez précise: celle d'un vieux garçon honorable, charitable, tatillon, qui se mêlait de tout.

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EAN
9782851977175
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