REVUE 14-18 TODAY HEUTE 4 MARGINAUX MARGINALITE ET MARGINALISATION EN GRANDE GUERRE

S'il est aujourd'hui clairement établi que l'édifice du consentement de 1914-1918 a subi quelques fissures, et même une usure sensible à partir de l'année 1916, l'idée que ces failles ont été clairement le fait des
"pacifistes" prévaut encore. A tort, car en lieu et place de cet exutoire idéologique, les phénomènes de marginalité ont été sans doute plus importants. Prisonniers, déserteurs, mutilés, veuves, orphelins, opposants ou populations occupées, ces catégories de " marginaux " ont bien été dans la guerre, et dans le même temps à côté d'elle. La dichotomie traditionnelle "soldat/civil", "avant/arrière", qui a figé les représentations des sociétés européennes en guerre, cède ici le pas à une mémoire moins défaillante centrée sur ces "oubliés" de la Grande Guerre. Le sentiment d'inutilité du blessé, la peur qui conduit à la désertion, l'expérience d'occupation, le deuil d'autant plus douloureux qu'il s'attache à un combattant "déshonoré", ont tissé un faisceau d'opprobre, d'indifférence et, en effet, d'oubli. Ce sont ces visages marginalisés qu'il convient aujourd'hui de retrouver.