Enquête sur 25 trésors fabuleux

LE TRÉSOR QUI TUE

Le 9 juin 1938, Jean-Baptiste Dufour pénètre dans l'agence immobilière Perez, située dans le quartier du port, à Alger. A ses côtés, se tiennent sa femme Marguerite et leurs deux filles, Rose, quinze ans, et Angélique, douze ans. Monsieur Perez les accueille, tout sourire.
- Bonjour, que puis-je pour votre service? Jean-Baptiste Dufour arbore, lui aussi, un large sourire.
- Voilà, c'est très simple: on arrive de la métropole et on vient s'installer chez vous!
- Alors, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue... Quel quartier aurait votre préférence?
- Celui-ci. Je travaille dans les douanes. J'ai mon bureau sur le port.
- Vous ne pouviez pas mieux tomber, le port, c'est ma spécialité! Pour une famille de quatre personnes, le mieux, c'est une maison individuelle.
- Comme vous y allez! Je ne suis pas Rockefeller. On n'est pas riche dans l'Administration!
- Justement, j'ai ce qu'il vous faut et pour un loyer ridicule: trois cents francs par mois! Si vous voulez, nous pouvons la visiter tout de suite.
Jean-Baptiste Dufour se garde bien de manifester sa surprise, mais il n'en revient pas. La somme est effectivement ridicule. Pour ce prix-là, en région parisienne, on a tout juste un studio et encore! Il se contente de répliquer:
- D'accord. Allons voir...

*

Peu après, la famille est sur place. L'étonnement qu'avait manifesté Jean-Baptiste à l'énoncé du loyer se mue en stupeur. La villa est une petite merveille. Elle est bâtie en style mauresque, avec des balcons en fer forgé, une façade décorée de motifs en faïence bleue et une colonnade. Située entre une boulangerie, dont elle est mitoyenne, et un terrain de football, elle possède un vaste jardin semé d'orangers. Impressionnante, elle semble presque déplacée, au milieu de cet environnement banal. On ne voit qu'elle dans la rue!
L'intérieur est à l'avenant. On y trouve de vastes pièces au plancher ciré, aux murs ornés de mosaïques et aux fenêtres garnies de vitraux multicolores. Outre les salles du rez-de-chaussée et les chambres du premier étage, toutes meublées, il y a aussi une cave et un grenier. Une fois la visite terminée, monsieur Perez se tourne vers monsieur Dufour.
- Alors? Si vous êtes d'accord, le temps de signer les papiers et vous pouvez vous installer.
Jean-Baptiste Dufour est, bien entendu, d'accord.
Une fois dans l'agence, il lit et relit le contrat de location, pour voir s'il n'y aurait pas de clause cachée quelque part. Mais non, tout est parfaitement transparent: c'est trois cents francs par mois, pas un centime de plus. Il signe et repart avec les clés, la mine triomphale.

*

(...)