Jean Ferrat. Le charme rebelle

Bellaïche Raoul

ARCHIPEL

LA FAMILLE TENENBAUM

«C'était Noël, rappelle-toi
Le jardin sous la neige...»

C'était encore Noël, et le jardin était sans doute sous la neige ce vendredi 26 décembre 1930 lorsque Jean Ferrat voit le jour à Vaucresson, dans les Hauts-de-Seine, «au domicile de ses père et mère, avenue de Vaucresson, Villa Raymonde», à 11 h 30. Il est le «petit dernier» d'une famille de quatre enfants. Son père, Mnasha Tenenbaum, est né le 15 août 1886, à Ekaterinodar, une ville russe située à 1 200 kilomètres au sud de Moscou qui prendra le nom de Krasnodar en décembre 1920.
Mnasha - ou Mnacha, comme inscrit sur ses papiers officiels français -, qui se fera plus tard appeler Michel, quitte la Russie et arrive en France - peut-être à pied, laissera entendre un jour son fils1 - en 1905 ou 1906, à l'âge de dix-neuf ans ou vingt ans, au moment de la première Révolution russe, peut-être également poussé par la vague de pogroms que connaît le pays entre 1903 et 1905. Ses deux parents étaient morts plusieurs années auparavant: son père, en 1887, un an après sa naissance, sa mère en 1901.
Pendant sept ans, Mnacha habite à Chaville avant de trouver, en octobre 1913, un appartement à Paris, au 132 rue deTurenne (dans le IVe arrondissement), où il a installé son atelier d'artisan en bijouterie. «Il fabriquait des bijoux à partir de dessins que lui confiaient les grands joailliers parisiens, raconte Pierre Tenenbaum, l'un des frères aînés de Jean. C'était de l'artisanat, mais dans le luxe, en quelque sorte. Il fournissait ainsi de grandes marques, du genre de celles qu'affectionne notre président...»
Interviewé en 2004 par Hélène Hazéra dans l'émission «A voix nue», sur France Culture, Jean Ferrât avoue avoir très peu de renseignements sur la jeunesse de son père. «Il n'a jamais parlé de sa vie en Russie pendant son enfance. Il avait un frère qui est passé, paraît-il, un moment en France et qui a disparu sans laisser d'adresse ni de traces. Ma mère, à qui je posais la question après sa disparition, m'a simplement dit qu'il ne lui avait rien raconté, sinon qu'il avait été élevé par une tante.» «Il fallait lui arracher les mots pour avoir quelques détails...», avouera un jour Antoinette à son fils.
«Dans le souvenir que j'ai de lui, et d'après les photos, c'était un bel homme, ajoute Ferrât. Blond-roux, assez grand, il était un petit peu corpulent... Et ma mère était une toute petite personne, très petite, très fine, une petite souris...»
Pendant la Première Guerre mondiale, Mnacha, qui n'est pas mobilisé, travaille comme ajusteur dans une usine d'aviation - les établissements Savary - à Levallois-Perret.
On ignore à quel moment Mnacha fait la connaissance de celle qui va devenir sa femme, Antoinette Malon, née à Paris, le 8 novembre 1888, de parents originaires du Puy-de-Dôme.
«Notre mère nous avait souvent raconté qu'elle avait, dans sa jeunesse, travaillé dans une fabrique de fleurs artificielles, précise Pierre Tenenbaum. J'imagine qu'elle a arrêté de travailler lorsqu'elle a eu ses premiers enfants: ma soeur Raymonde en 1916 et mon frère aîné André en 1918.»
Le 17 juillet 1916, Mnacha et Antoinette sont les parents d'une petite fille, prénommée Raymonde, née à Paris alors qu'ils ne sont pas encore mariés. Ils «régulariseront» l'année suivante, le 8 décembre 1917, en convolant à la mairie du IIIe arrondissement. Léontine, la soeur d'Antoinette, figure parmi les témoins.


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EAN
9782809810363
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