Chronique d'un malheur annoncé. Edition bilingue français-russe

Sinaria Shain ; Sayar Shirin Melikoff

VERDIER

L'Énigme du Sphinx

Au terme d'une longue attente, l'année 1980 fut pour tout le peuple soviétique source de fierté. La toute-puissante U.R.S.S. tendait les bras aux sportifs du monde entier. Au plus fort de la guerre froide, le pays des Soviets accueillait les jeux Olympiques.
L'âme frémissante, les hommes du pays suivaient les préparatifs de cette grande fête du sport. Discussions, pronostics, supputations et paris allaient bon train, quels que fussent la discipline, l'équipe ou le champion.
Les femmes du pays n'étaient pas moins excitées: à l'approche des Olympiades, boutiques et magasins se trouvaient bien mieux achalandés. On vit apparaître sur les étals des produits et marchandises tout à fait introuvables jusque-là.

Avec quelque anticipation, je dois souligner que 1980 fut une année de fête et de liesse, mais aussi de tristesse et de chagrin: ce fut l'année de la mort de Vladimir Vissotski, un des plus grands bardes du pays, aimé de tous. À peu près à la même période, en France, disparaissait Joe Dassin, chanteur non moins aimé par les jeunes Soviétiques.
Chaque année charrie sans doute son lot de joies et de peines. Pourtant, l'année 1980 fut si riche qu'elle me reste en mémoire comme l'année des plus grands bonheurs et malheurs de ma rie. Pour ceux qui étaient nés en 1962, c'était l'année de leur jeunesse: ils avaient dix-huit ans, le plus bel âge pour un homo sovieticus. Moi, Victor Fedorovitch Voronin, ou tout simplement Vitia, j'étais de ceux-là. Donc, le 25 avril 1980, j'eus dix-huit ans; et deux mois plus tard, le 28 juin à douze heures précises retentit la «dernière sonnerie» de ma vie d'écolier. Pour la première fois, le directeur qui nous avait rassemblés dans le «salon rouge», arborait un sourire, il nous serra la main et nous appela par notre nom avant de nous remettre notre diplôme de fin d'études secondaires.
Nous étions trois: Sacha, Kolya et moi. Trois inséparables amis, ce qui nous valait à l'école le surnom de «Sainte Trinité». J'ajouterai un détail important: à dix-huit ans, nous étions véritablement «saints», c'est-à-dire puceaux.
Au début de cette ultime année scolaire, nous avions acheté une tirelire dans laquelle nous mettions tout notre argent de poche. D'un commun accord, nous avions convenu de la briser le dernier jour de notre vie scolaire, puisque la somme était destinée à «l'enterrement» de notre pureté.
A contrario du capitalisme en putréfaction, notre saine U.R.S.S. était un modèle de moralité et de probité et pour cela il n'y avait ni liberté sexuelle, ni maisons closes. Ce qui ne veut en aucun cas dire qu'il n'y avait pas de prostituées. Au contraire, notre ville en comptait davantage que de femmes honnêtes. Il y avait même un «bordel», clandestin, bien évidemment. C'était en apparence un hôtel, mais en fait, chacun savait qu'on ne s'y rendait pas seulement pour y passer la nuit, mais surtout pour assouvir ses besoins sexuels.


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EAN
9782911686481
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