La pub est morte, vive la communication

Rencker Edouard

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Extrait



Extrait de l'introduction

Mensonges, brouillages et confusions : la com était-elle devenue un objet «nuisible» ? Consommateurs méfiants, citoyens désabusés, salariés déprimés : le marché de la méfiance s'est durablement installé dans nos sociétés. Une crise de foi, doublée d'une crise morale alimentée autant que révélée par la communication. Scandales financiers (d'Enron à Madoff), mensonges {subprimes) et trahisons (Société générale et affaire Kerviel) ont emporté les entreprises dans une nouvelle et désastreuse tendance, celle de la méfiance. On connaissait la méfiance traditionnelle envers la classe politique ou les médias, voici venue l'ère de la méfiance à l'égard des discours des entreprises et de leurs dirigeants. Et l'ensemble des baromètres converge vers les mêmes constats : «67% des Français sont désormais plus méfiants envers les entreprises que l'an passé» et «63 % ne croient plus aux discours institutionnels, y compris ceux de sa propre entreprise (48 %)».
Source et réceptacle de tous les maux, la communication est devenue celle qui manipule, cache et abuse. Au-delà de la publicité, passée en moins de dix ans «du statut d'art populaire à celui de l'instrument de la manipulation», c'est l'ensemble de la com qui est accusée désormais de pervertir l'espace social et sociétal. La com qui joue avec les signes, les envies, les informations, les convictions. Soupçonnée de faire passer les pires pollueurs pour des chantres du développement durable, les virtuoses des fonds de pension pour des gestionnaires «pères de famille». Et de transformer une marque sans scrupule en icône de supermarché.
Il est vrai que jamais les entreprises n'ont tant revendiqué des valeurs contraires à leurs actions : des institutions financières qui dissimulent ou perdent des milliards affichent la proximité de leurs équipes avec le terrain à grand renfort de campagnes de pub lénifiantes ; des équipementiers sportifs qui se déclarent socialement responsables font fabriquer leurs produits par des enfants dans des pays du tiers-monde transformés en nouveau Lumpenproletariat ; des entreprises licencient massivement tout en brandissant leur forte responsabilité sociale... Le brouillage des signes est permanent. Un comportement que les Anglo-Saxons, passés maîtres dans l'art du syllogisme, ont épingle sous le terme green washing, un nouveau mode de «blanchiment».
Résultat, tout se mélange : Apple et les ombres chinoises de son gigantesque sous-traitant Foxconn, Arcelor et ses «fausses» promesses sur Florange, Spanghero et la viande de cheval... Avec des amalgames tragi-comiques : ainsi, on pouvait lire, début 2013, sur la Toile, cette information définitive : «Le pape a démissionné pour avoir couvert un trafic de viande de cheval» !
Ce phénomène est amplifié par les multiples techniques déployées ces dernières années par les communicants. Ainsi, les dégâts du fameux storytelling, technique consistant à offrir à des consommateurs supposés à la recherche de sens un «univers cohérent», une «vision du monde», mais qui est rapidement devenu l'art de raconter des bobards. «Une machine à formater les esprits», assène même le sociologue Christian Salmon. Sans oublier la mode du «360°», méthodologie perçue comme une tentative d'imposer une pensée unique et une tentation permanente de manipulation des contenus, nouvelles techniques de communication en vogue.



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EAN
9782809813890
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