Bataille conservateur. Emprunts intimes d'un bibliothécaire

Cornille Jean-Louis

L'HARMATTAN

Georges Bataille, qui avait une formation d'archiviste, occupa durant sa vie divers postes de bibliothécaire. Si l'auteur fut un véritable rat de bibliothèque, comme l'attestent les registres où furent consignées ses innombrables lectures savantes, il resterait à établir la liste parallèle, tout à fait officieuse, des lectures d'œuvres le plus souvent littéraires qu'il pratiquait dans les marges de ses propres romans et récits, avant de chercher à discrètement les y intégrer. " Emprunt " prendrait ici un tout autre sens et désignerait l'usage irrégulier, voire quasiment frauduleux, que l'écrivain fit de certaines œuvres (celles, prestigieuses, de Sade, de Rimbaud, de Céline, de Proust et de Kafka, mais aussi celles, contemporaines, de Breton et de Klossowski et même de Pauline Réage) - usage qui n'aurait en aucun cas pu trouver grâce aux yeux du conservateur. Comment devient-on bibliothécaire ? Comme l'on devient auteur, sans doute. Par vocation. Imaginons Bataille tout jeune encore s'aventurant dans le cabinet de son père. A peine a-t-il tenté de retirer l'un ou l'autre volume des rayons qu'il en tombe une multitude de photographies érotiques. Comment contenir un tel déferlement ? Comme l'on colmate une brèche : en replaçant l'ouvrage à l'endroit qui convient. Dans ces conditions, on comprend que derrière un livre s'en tienne toujours un autre. Voilà qui définit parfaitement l'imaginaire étroit dans lequel devait bientôt se cantonner l'écrivain : les livres sont là, à portée de main. Mais c'est derrière ces œuvres de littérature, derrière ces romans empruntés, dissimulés sous eux, que se développeront les récits propres à Bataille, à jamais égaré dans la bibliothèque du père.
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EAN
9782747576338
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