Le judéo-christianisme

Teixidor Javier

FOLIO

Extrait de l'introduction:

Ce livre n'est pas une histoire abrégée des relations entre le judaïsme et le christianisme pendant deux mille ans mais une somme de réflexions sur le judéo-christianisme, une notion qui a acquis de nos jours une nouvelle résonance sans qu'elle en soit devenue pour autant moins imprécise; cela n'est pas étonnant puisque tout au long de leur parcours judaïsme et christianisme ont décanté non pas une mais plusieurs notions de «judéo-christianisme». Une certaine volonté actuelle d'accoler les deux religions peut réveiller chez les juifs et les chrétiens le souvenir de rencontres bénéfiques mais aussi celui de confrontations pénibles dans lesquelles les uns et les autres avaient oublié l'origine commune de leurs croyances. Le fait historique fondateur de la notion de judéo-christianisme, quelle que soit l'interprétation qu'on a pu donner de celle-ci, reste bien entendu que Jésus était juif et que les apôtres l'étaient aussi; la nouvelle religion qu'ils apportèrent au monde était née en Judée où les livres de l'Ancien Testament étaient lus et commentés. Le christianisme ne peut qu'être redevable des convictions du judaïsme du Ier siècle de notre ère; il s'en dégagea comme un fruit de la branche qui le portait.
Au début, il y avait des juifs convertis au christianisme qui continuaient à observer les rites juifs et qui, au-delà des pratiques traditionnelles, plaçaient croyances et notions religieuses dans le contexte exclusif de l'Ancien Testament. Ce phénomène «judéo-chrétien» de coexistence de cultures religieuses se manifeste à nouveau aux VIe et VIIe siècles quand le pouvoir civil, au nom de la religion d'État, força les juifs à se convertir au christianisme; le principe que «la religion» devait être «celle du roi» s'imposa. Plus tard, les tribunaux européens de l'Inquisition firent preuve de compétence et de détermination quand il s'agissait de libérer la vraie religion de toutes les déviations judaïsantes. Mais au-delà de ces considérations, qui restent du domaine de la conscience individuelle, notre culture elle-même peut à juste titre être décrite comme une culture «judéo-chrétienne». Rien ne permet pourtant d'amalgamer judaïsme et christianisme, même si pendant la seconde moitié du XXe siècle le judéo-christianisme a pu être le sujet de maint écrit théologique et si des personnalités ecclésiastiques et politiques s'en sont parfois servies - et s'en servent encore - pour renforcer la thèse que les chrétiens se sentent plus proches du judaïsme que de l'islam. Aujourd'hui, les mots judaïsme et christianisme, entendus ou lus, sont présents plus que jamais dans la vie de tous les jours, mais leur signification religieuse, ou autre, prend forme dans le for intérieur de chacun d'après une herméneutique personnelle (parfois de groupe) qui tend à oublier ce que ces deux religions ont accompli au long des siècles. L'antisémitisme ronge notre société depuis plus de deux mille ans. Il était déjà virulent à l'époque hellénistique à Alexandrie comme à Babylone, où des émeutes mettaient bien en évidence la complexité des rapports entre les communautés juive, grecque et syrienne.

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EAN
9782070339556
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