La liberté sans choix politique

Domecq Jean-Philippe

1001 NUITS

Ce livre met à l'épreuve deux intuitions concordantes: 1- que le discours politique n'ose plus parler de l'essentiel; 2- que le peuple peut avoir tort contre lui-même. - La première intuition, relative au non-dit que l'on sent au coeur du discours politique dominant, résulte des vingt dernières années et engage l'avenir de nos sociétés. savoir: voulons-nous d'une civilisation dont la valeur centrale est l'argent? La question est plus claire que jamais, aujourd'hui que l'argent mondialisé tient la place englobante occupée autrefois par le religieux puis par le politique. Le discours politique de gouvernement n'ose plus parler des injustices criantes et des disproportions irréalistes que nous impose ce qu'il faut bien appeler le capitalisme - et l'embarras à ressortir le mot désigne assez le non-dit. Le voilà, le manque au coeur du discours politique.

La mondialisation ne justifie pas durablement cette inhibition, l'homme ayant surmonté bien d'autres contraintes dans l'Histoire, dont il n'est pas souhaitable que la fin annoncée soit le règne du marché. Les perspectives découleront donc ici d'un diagnostic clairement reformulé sur le malaise d'une civilisation où l'argent, de nécessité et passion de toujours, est devenu valeur, et valeur qui a vocation à se soumettre toutes les autres valeurs. - Le second propos est lié au précédent puisque le peuple consent au règne de l'argent dont il souffre pourtant. Il rejette les politiques qui essaient de limiter ce règne, plus souvent que celles qui le couvrent ou le cautionnent. En même temps, il se plaint de l'injustice. C'est le double-bind populaire.

Dire que le peuple reproche aux hommes politiques ce qu'il pourrait assez régulièrement se reprocher pourra paraître iconoclaste, car de quel droit le dire en démocratie? Reste que le portrait qu'il livre au miroir que lui tend la média-démocratie n'est pas flatteur a priori. Celle-ci, pour que le téléspectateur reste devant l'écran, le flatte dans le sens d'un individualisme toujours plus soucieux des aises et droits du moi-moi, et toujours moins conscient de son appartenance à une collectivité. Humeur, proximité repliée sur le périmètre de soi, revendication de ses droits et mépris des devoirs qui vont avec, corporatismes, communautarisme: la politique a été privatisée.

Or, le propos politique est inhibé lorsqu'il est contraint de gommer les perspectives collectives. Ce problème du tort que se fait le peuple ne date pas d'aujourd'hui, il a existé dans toutes les formes de participation populaire à la cité, depuis la Grèce et Rome. Qui, d'ailleurs, déléguait au Censeur le rôle de critiquer gouvernés et gouvernants tour à tour. En média-démocratie, cette discussion critique avec l'opinion doit revenir à l'homme politique. Encore faut-il l'y aider, au lieu de toujours le prendre pour bouc émissaire. la manière de la littérature moraliste, tirant croquis et leçons de nos jeux d'opinion, Quand la politique parlera poursuit ainsi la réflexion entamée par les deux premiers volets du triptyque intitulé La liberté sans choix: la Passion du politique (Seuil, 1989) et Petit traité de métaphysique sociale (Quai Voltaire, 1992).

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EAN
9782842057190
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