Trésors

Levasseur Emmanuelle

GLENAT







Extrait

La nuit DE LA MANTA Le bateau était mouillé dans les eaux calmes d'An Atoll, aux Maldives. La journée avait été fantastique, comme toutes celles passées depuis le début de la croisière. Nous voguions d'atoll en atoll sous une brise légère, croisions parfois de frêles esquifs et saluions les pêcheurs de loin. Nous savourions l'illusion délicieuse d'être seuls au monde. Pour rompre cette langueur, soit nous cherchions les raies mantas - c'est un excellent stimulant cardiaque -, soit nous mettions un masque et nous glissions dans l'eau. Une palette de couleurs, d'espèces, de formes s'offrait alors à nous. L'exubérance de la vie à l'état brut. Nous pouvions sillonner de vastes lagons, entourés de nuées de poissons aux couleurs électriques, palmer au-dessus de jardins de corail, plonger côté océan, la grande faune du large à portée de palmes. Mais le plus sensationnel, c'était les longues dérives dans les passes étroites, renouvelées grâce aux va-et-vient qu'effectuait Idam avec l'annexe. Petits requins, raies aigles, carangues, tortues, barracudas glissaient alors avec nous ou nous croisaient dans le courant. Le soir venu, Adambé, le capitaine, abordait une île sauvage et mouillait à l'abri d'un récif ou dans le lagon. La douce lumière des couchers de soleil nous enveloppait, puis les aventures sous-marines du jour laissaient peu à peu chacun à son rêve sous un ciel étoile. Nous étions sept snorkeleurs à bord et avions un objectif commun : nager avec les raies mantas. Elles nous ont acceptés dans le grand cirque pendant plus de deux heures. Elles étaient une trentaine, divisées en deux bancs. Elles sondaient ensemble puis réapparaissaient au bout de quelques minutes. On les voyait remonter du fond à grande vitesse, passer près de nous, faire demi-tour, revenir... D'un coup, elles se sont mises à tourner sur elles-mêmes, virevoltant juste sous la surface, affolant les énormes boules de petits poissons fourrage dont elles se délectent. Le ballet était magnifique. Après avoir vécu cela, chaque île, chaque récif au loin, chaque changement de teinte des eaux de surface nous donnaient l'illusion d'un monde peuplé d'animaux fantastiques. Nous savions désormais qu'aux Maldives, ce monde est réalité. Nous avions regagné le bateau principal à la nuit tombée. L'espace dévolu aux cuisines, toujours bien éclairé, se situait à l'arrière du voilier. Cette lumière attirait des myriades de petits poissons. Mais ce soir-là, comme une invite à prolonger la féerie, une manta profitait de l'aubaine, alignant les tonneaux, la gueule ouverte, frôlant la coque du bateau à chaque passage. Elle tournait sur elle-même, telle une danseuse. Fourbus, affamés, nous n'étions pas vraiment décidés à plonger pour nager avec elle. C'était une occasion peut-être unique de faire des photos de nuit avec l'animal, mais les ténèbres sous-marines à cette heure tardive ne nous inspiraient guère. De plus, nous savions que nos compagnons de voyage ne seraient pas de la partie. Jérôme, qui conduisait cette croisière, sentit notre hésitation et plaisanta sur notre manque d'entrain. - Allez, venez manger, vous aurez bien le temps d'y aller après un bon repas et un café. La raie manta sera toujours là.



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EAN
9782723490597
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