Etre pompier

Kanzari Ryad

LIEUX DITS

Nos héros les pompiers

Le métier de pompier n'est pas nouveau: officialisé à la fin du Moyen Âge, il a connu une multitude de formes, passant d'organisations associatives de commerçants à un système militaire en armes, pour se professionnaliser, et donner aujourd'hui vie à une organisation reposant à environ 80 % sur des volontaires. Les pompiers ont le devoir de porter secours à tout moment et à toute personne, quelle que soit son identité ou sa position, c'est un engagement moral. Et pour la population, faire appel aux sapeurs-pompiers est un droit.
Être pompier est encore de nos jours synonyme d'un réel engagement dans une action citoyenne concrète. Quelle que soit l'heure de la journée ou de la nuit, les pompiers sont le dernier recours, ceux que l'on appelle en urgence, lorsque toutes les solutions sont épuisées, lorsqu'on a besoin d'être évacué, de quitter une situation intenable, redoutée, lorsqu'on est en souffrance. On appelle même les pompiers quand il est trop tard, quand le décès est déjà constaté. Même si de nouvelles tendances apparaissent - les pompiers sont de plus en plus sollicités pour des interventions bénignes (animaux domestiques, disputes conjugales, clés perdues...) -, les secouristes répondent toujours aux appels, leur engagement persiste. Témoin de l'état moral de nos sociétés, le métier de pompier est fondé sur une organisation, une structure, des valeurs et des personnalités que j'ai rencontrées, écoutées, et voulu comprendre.

MA RENCONTRE AVEC LES SAPEURS-POMPIERS

Au début de l'année 2001, les pompiers de Toulouse, où j'étudiais, se sont déclarés en grève, et prêts à aller jusqu'à la grève de la faim. Le problème: l'application des 35 heures dans leur profession. J'avais là un sujet de mémoire de maîtrise idéal: les pompiers, nos héros, sont à leur tour en détresse. Pourquoi ne pas aller directement dans une caserne pour demander ce qu'il se passe? J'ai ainsi rencontré des interlocuteurs généreux, qui m'ont permis d'en savoir un peu plus sur la difficile négociation des 35 heures chez les sapeurs-pompiers.
Quelques jours avant la soutenance de ma maîtrise, l'usine AZF explose: des milliers de victimes, l'université sinistrée; je décide de continuer à travailler sur ces hommes qui prennent en charge les conséquences de cette catastrophe démesurée.
L'explosion de l'usine chimique a été pour eux une épreuve difficile, mais la reconstitution des faits a posteriori en est une autre: soit les témoins ne veulent plus parler, traumatisés, ils refusent les entretiens ou manquent délibérément mes rendez-vous, soit ils se confient à demi-mot, je dois insister, parfois aller les rencontrer dans leurs nouvelles vies, dans d'autres départements.
Mais il fallait aller plus loin, vivre dans une caserne pour de vrai, partager les repas de la cantine, participer aux conversations, comprendre la manière dont les pompiers voient le monde, s'en imprégner: là encore les pompiers font preuve de générosité, ils me prêtent une tenue complète (jusqu'aux bottes) et me réservent un lit, une chambre même, dans une caserne importante de la région. Le stage est difficile, carie métier est difficile, les nuits ne sont pas faites pour dormir, et les journées sont actives, mais ces quinze jours passés en pompier sont riches, formateurs. Je découvre dans le détail leur travail au quotidien et l'importance de leur identité professionnelle, une identité qui est peut-être le moteur principal de leur motivation.

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EAN
9782362190346
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