Bouvreuils, chardonnerets et autres passereaux européens

Extrait

Avant-propos de Jacques FAIVRE

J'élève des oiseaux depuis un demi-siècle. Je suis né, je crois, avec cette passion, sans doute héritée de mon entourage familial. Car des oiseaux, à la maison, j'en ai toujours vu. Même durant la période de disette que fut la guerre de 39-45 Je n'étais qu'un bambin à l'époque, mais je me souviens d'une grande cage accrochée, l'été, au volet de la cuisine. Le couple de chardonnerets qui l'occupait n'avait d'autre nourriture que ce que mon père récoltait dans les friches environnantes. Ils y nichaient.
Mon père, c'était un homme simple, un homme du terroir, sans grande instruction. Mais il avait appris sur le tas à traduire le vent dans les feuillages, la couleur des eaux, l'odeur des matins C'était le genre de type capable de dire, à l'aspect d'une fleur ou au son d'un clocher, le temps du lendemain. Son commentaire, lorsque l'écologie devint une mode : «Ces gens passent leur temps à découvrir des évidences !».
Il savait expliquer. Avec ses mots, et parfois rudement. Car je vivais, moi, l'enfance insouciante et sans complexe des garnements de ma génération, fouinant par ci, dénichant par là, ce qui me valut quelques mémorables raclées ! À cette époque, ni le stress, ni le traumatisme infantile n'étaient inventés, et l'on ne badinait pas avec l'autorité paternelle. Et je ne m'en suis pas porté plus mal : j'ai acquis, de la sorte, le sens du respect de ce qui nous entoure, et aussi l'attrait de la connaissance.
Puis, j'ai eu mes premiers oiseaux, des canaris. Je me suis documenté, mais j'ai aussi observé sur le terrain. J'ai comparé, recoupé, approfondi Bref, j'ai appris. L'approche du monde associatif m'a ouvert un autre horizon : celui de la sélection, de la compétition, mais celui, aussi, du contact et de l'échange. J'y ai découvert uns culture méconnue parce que confidentielle, mais combien riche de tradition et de savoir-faire ! Je m'y suis fait de solides amitiés. Au fur et à mesure que j'intégrais la diversité de la pratique, j'ai noué mes premiers contacts internationaux. C'est de là que me vint le goût de l'élevage des oiseaux de chez nous, pratiqué tout à fait légalement partout en Europe, mais marginalisé en France en raison d'une législation ambiguë, devenue progressivement répressive, et du manque d'opportunité d'un encadrement associatif trop frileux.
Malgré tout, j'ai pratiqué, en m'efforçant de rester dans les limites de la légalité. J'ai fait, au contact d'éleveurs d'outre-frontières, mes premières armes dans la sélection d'espèces dont l'élevage était, chez eux, en plein essor. Les circonstances ont voulu que je sois l'un de ceux qui participèrent à l'évolution de la réglementation française qui, depuis 2004, permet enfin à ceux qui veulent bien souscrire à ces obligations de s'adonner à cette spécialité. Cet ouvrage se veut avant tout une rétrospective pratique, un reflet d'une expérience acquise au fil des lustres. Il n'engage que moi, et n'a aucune prétention d'ordre scientifique : je n'en ai ni le savoir ni les titres, et mes limites d'autodidacte ne me la permettent pas. Simplement, je souhaite que les amoureux de notre avifaune, dont l'élevage encadré et bien compris peut être un moyen de la protéger, y trouveront leur compte.