O Nation sans pudeur

Dick Philip K. - Collon Hélène

J'AI LU







Extrait



C'était le début de l'été et la journée s'achevait. L'après-midi avait été doux, mais le soleil se couchait, et maintenant le froid s'installait. Carl Fitter descendit les marches du perron, laissant derrière lui la résidence des hommes ; il portait une valise pesante et un petit paquet ficelé.
Il marqua une pause au pied de l'escalier en bois brut, dont la laque grise était tout écaillée par le temps. Ces marches avaient été peintes bien longtemps avant qu'il ne vienne travailler pour la Compagnie. Il se retourna vers la porte d'entrée du bâtiment. Elle coulissait lentement. Elle finit par se refermer avec un claquement sonore. Cari posa sa valise et s'assura que son portefeuille, bien en sécurité dans sa poche boutonnée, ne risquait pas de tomber.
- C'est la dernière fois que je descends cet escalier, fit-il tout bas. La dernière fois. Quel bonheur de revoir les États-Unis après tout ce temps !
Derrière les fenêtres, on avait tiré les stores. Les rideaux n'étaient déjà plus là. Sans doute emballés dans un carton quelque part. Il n'était pas le dernier à partir ; il fallait encore tout verrouiller. Mais ce serait le travail des ouvriers, qui veilleraient à ce que chaque porte, chaque fenêtre soient barrées de planches, hermétiquement closes, afin de protéger le bâtiment jusqu'à l'arrivée de ses nouveaux propriétaires.
- Pitoyable. Enfin... le dortoir n'a jamais eu tellement d'allure, de toute façon.
Il reprit sa valise et s'avança dans l'allée. Le soleil, presque entièrement masqué par les nuages, jetait ses derniers feux. Comme souvent à cette heure, l'air semblait se charger de particules, comme si un voile de poussière s'animait en prévision de la nuit. Carl s'immobilisa en atteignant la rue.
Devant lui, deux véhicules de la Compagnie entourés d'hommes et de femmes, ainsi qu'un monceau de bagages et de cartons qu'un ouvrier entassait dans les coffres arrière. Carl vit Ed Forester qui se tenait là, un papier à la main. Il alla le rejoindre.
- Carl ! fit Forester en levant la tête. Qu'est-ce qui se passe ? Je ne vois pas votre nom sur la liste !
- Comment ça ?
Carl voulut lire par-dessus l'épaule de Forester, mais, dans la pénombre, il ne distinguait pas les noms.
- Tous les gens qui partent avec moi sont énumérés ici. Et je ne vous trouve pas. Et vous ? En général, les gens repèrent tout de suite leur nom.
- En effet, je ne le vois pas.
- Qu'est-ce qu'on vous a dit au bureau ?
Carl regarda vaguement les gens qui restaient et ceux qui étaient déjà installés dans les deux voitures.
- Carl ? Je vous parle ! Qu'est-ce qu'on vous a dit au bureau ?
Carl secoua lentement la tête. Puis il posa ses bagages et alla en silence détailler la liste à la lumière des phares. Effectivement, son nom n'y figurait pas. Il retourna la feuille, mais le dos était vierge, à part l'en-tête de la Compagnie. Il la rendit à Forester.
- Et c'est le dernier groupe ? s'enquit-il.
- Oui, à part le camion des ouvriers, qui partira demain ou après-demain. Naturellement, reprit-il après un silence, il se peut que...
--Ce texte fait référence à l'édition






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9782290033814
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