Au commencement était le soin. Pour une autre modernité

A quelles conditions l'effondrement généralisé pourrait-il ne pas avoir lieu ? Il paraît inévitable à beaucoup, plus encore depuis que la crise sanitaire induite par la pandémie de la covid-19 a mis en évidence la grande fragilité des institutions humaines et la solidarité organique entre le monde humain et la nature. Il faudrait pour l'éviter plus que le verdissement des politiques publiques et de quelques industries particulièrement polluantes. Cet essai propose une description originale de ce qui, depuis deux siècles, corrode méthodiquement le socle sur lequel reposent la prospérité et le progrès : une conception de la puissance fondée sur le paradigme de la force. Mais une énième analyse de ce qui perd serait néfaste si elle n'était pas le prélude à une proposition portant sur ce qui peut sauver. La bonne nouvelle est que les ingrédients du salut ne sont pas à rechercher dans on ne sait quelle utopie. Ils sont là, depuis toujours : l'attention à la vulnérabilité et le "prendre soin" de ce qui est fragile. Contrairement à une idée courante, le care, ainsi qu'il a été nommé et théorisé outre-Atlantique, déborde de loin le domaine de la santé. Paradigme puissant, il peut nous conduire à réencastrer l'économie dans le social et les deux dans les écosystèmes. Chacun, à la place qui est la sienne dans le monde, peut contribuer à inverser le cours catastrophique des choses... en faisant d'ores et déjà un pas de côté.