Revue des deux Mondes Mars 2013 : Le puritanisme, enquête sur le bien et le mal

Crépu Michel

REVUE 2 MONDES

Le diable et le bon Dieu. Le puritanisme est devenu, avec le temps, un épouvantail pratique à brandir pour les besoins de la cause. La cause ? La guerre à l’obscurantisme, au « réac », aux valeurs moralisatrices qui n’ont d’autre but que d’enfoncer les individus dans un toujours plus de culpabilité. L’accusation de « puritanisme » s’accommode en ce sens très bien des nouvelles règles édictées par le politiquement correct, maladie infantile du soixante-huitardisme attardé. De plus, la puissance puritaine outre-Atlantique, toujours aux aguets de la faute, donne d’elle-même une image si inquisitoriale que l’on ne cherche guère à examiner de plus près cette machine à produire si efficacement du « bien » et du « mal ». Le dossier que présente ici la Revue des Deux Mondes n’a pas pour but d’enfourcher on ne sait quel querelle opposant le « correct » à l’« incorrect », mais à prendre du recul historique par rapport à une notion qui emprunte à plusieurs veines: religieuses, esthétiques, politiques. Ce n’est pas un hasard si Emile Faguet, grand professeur de littérature, dans un texte que nous reproduisons ici en partie, voyait d’abord en Calvin le « plus grand écrivain du XVIe siècle », à l’égal d’un Rabelais. Et il ne serait pas très difficile de suivre la trace d’un héritage calviniste jusque dans les textes d’un Samuel Beckett, sorte de Calvin séculier, retournant ironiquement l’appareil dévot contre lui-même en faisant du bien et du mal les figures inédites d’une comédie plus que grinçante… Encore plus près de nous, un Lars von Trier au cinéma, un Pascal Quignard en littérature (cf. Tous les matins du monde) ont su jouer d’un certain répertoire où la référence puritaine joue comme un agent esthétique. Qu’il y ait une relation étroite, intime, entre une « morale puritaine » et le monde de l’art suffirait à légitimer le bien-fondé d’un tel dossier : on voit bien que l’élément de la morale et celui de la beauté peuvent marcher de concert au lieu de s’opposer par une sorte d’antinomie si facile (trop ?) à instrumentaliser. Il n’y a pas d’un côté le sermon, et de l’autre la transgression : ce dualisme, pour -efficace qu’il soit, a ses limites. On le voit aussi à la lecture de l’entretien mené par Gérard Albisson avec le psychanalyste Jacques Sédat. Il y a donc bien un paradoxe puritain dont Jean-Yves Boriaud, historien de l’Antiquité, retrace ici le premier alphabet tandis que Jacques de Saint Victor l’examine « à la lumière de l’humanisme dévot », moment capital (notamment en France, pays de Montaigne et non de Calvin) d’une histoire française de la spiritualité. Ce paradoxe gagne à être connu, analysé, décrypté. Il est au cœur de nos hantises contemporaines, il obsède les magazines glamour. Il n’est pas jusqu’à l’obsession d’être « propre », « clean », voire « bio », qui ne soit un écho indirect au grand héritage puritain. C’est bien le rôle d’une revue d’en remonter la piste, de permettre au lecteur de mieux comprendre les états d’âme de son temps.


13,00 €
En rupture de stock
EAN
9782356500601
Découvrez également sur ce thème nos catégories Orthodoxie , Protestantisme , Apparitions , Missels , Sacrements , Vie religieuse , Prières , Essais catholicisme , Vie des saints , Jésus , Lectures de la Bible , Bibles , Evangiles apocryphes , Papauté , Histoire de l'Eglise dans la section Christianisme