Portrait de Sigmund Freud

Bolzinger André

CAMPAGNE PREM

PrésentationL'oeuvre de Sigmund Freud s'efforce de dépasser le cadre viennois afin que la psychanalyse soit reconnue comme une véritable science. Par définition, toute science parie sur l'universel; mais, en fait, l'idée d'universel varie d'un lieu à l'autre. Elle est fédératrice à Vienne, centraliste à Paris, pangermaniste à Berlin, catholique à Rome. Les écrits freudiens sont inséparables de Vienne, de l'esprit des lieux et du parler local.Les biographes ont tenté d'effacer l'accent allemand de Freud et de tracer un portrait conforme à leur penchant personnel: le solipsisme britannique, la désinvolture yankee, la fantaisie sud-américaine; la mode parisienne a privilégié le ton philosophique et le culte dévot des concepts et de la théorie.Certes, les lettres freudiennes expriment souvent une réaction d'insulaire, mais, en l'occurrence, c'est Freud lui-même qui tient la plume. Si son courrier formule parfois des avis désinvoltes ou fantaisistes, ce sont les siens, ni plus ni moins; l'épistolier se montre enthousiaste, ingénu, parfois grincheux ou docte, il ne parle pas ex cathedra et dédaigne la spéculation sur les idées. Ces milliers de pages, destinées à une soixantaine de correspondants, délivrent une jolie mosaïque de remarques, de confidences ou de citations déposées au fil de la plume; elles montrent l'homme tel que lui-même s'avoue au soir d'une journée de travail.Un portrait autographe, insolite parce que méconnu.Le créateur de la psychanalyse a vécu dans un bain de langues: l'allemand moderne, l'anglais des gouvernantes britanniques, le français des salons bourgeois, l'italien pour l'amour de Mozart, l'espagnol de Cervantès, sans oublier le yiddish des ashkénazes. Le volapuk et l'espéranto sont hors jeu; parler d'une seule voix serait absurde dans la capitale des Habsbourg, au coeur d'un Empire multi-ethnique.Le docteur Freud est juif et athée, philanthrope selon la tradition de la médecine viennoise, misanthrope comme un chercheur solitaire aux travaux dénigrés. Opiniâtre, insoumis et résigné, prudent et impulsif. Germanophile et antiprussien. Francophile et francophobe. Lecteur amical de Goethe et de Heine, de Shakespeare, de Daudet, Zola et Anatole France. Il cite la plupart des auteurs en version originale: traduire introduirait un leurre. Seule convient la finesse d'une oreille polyvalente qui reçoit le mot à mot originel; seule la langue première peut orienter l'analyse d'un rêve ou saisir le brio d'un mot d'esprit. Il est exclu de discuter de manière lointaine, du point de vue de Sirius ou dans la lucidité postiche des simplifications d'après-coup: ces feintes dénaturent la diversité culturelle et la flexibilité des opinions.Le florilège des lettres ici réunies, découpées et articulées, fait entendre la voix d'un soliste dans la polyphonie viennoise, couplets et refrains. Le vocabulaire est alerte, la syntaxe orale, le ton enjoué, l'humeur dépourvue de toute allégeance à une pensée unique. Les harmoniques de cette écriture seront reçues et ponctuées par une lecture bienveillante, sans qu'il soit opportun de glisser en incise des remarques critiques, une mise en distance, suspicieuse ou réprobatrice. Le lecteur fait crédit à ce que le rédacteur lui donne à lire comme l'analyste reçoit les mots venus du divan sans contredire.Les écrits rassemblés dans les Gesammelte Werke forment le côté cour de l'édifice freudien, et la correspondance le côté jardin.

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EAN
9782915789850
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