Premières dames

Schneider Robert

PERRIN







Extrait



Huit femmes

«La dernière Première dame» : est-ce ainsi que l'histoire nommera cette belle jeune femme, non épousée, non légitimée, mais - ceci explique peut-être cela - dotée d'un sacré caractère, Valérie Trierweiler ?
C'était la huitième de cette série inaugurée sous de Gaulle, non par la volonté du Général, mais par les impedimenta de la modernité. Yvonne de Gaulle, née Vendroux, tout habitée par son éducation religieuse et le «service» - chez les militaires, cela n'a rien de péjoratif - de ce dadet volontaire, timide, abstrait et déjà si imposant. «Laissez, Madame, laissez», avait-il coutume de dire lorsque la mère de ses trois enfants se risquait à une réflexion politique.
«Les temps changent.» Voilà une vraie phrase gaullienne et nous sommes en 1961. John F. Kennedy est en visite officielle à Paris. À son bras, une ravissante Américaine d'origine normande, que le président des États-Unis présente comme la «First lady», la «Première dame».
Dame ! Est-elle l'élue du peuple, la descendante en droite ligne d'une noblesse imaginaire qui aurait régné sur Coca-Cola au temps des Indiens ? Non, elle est la «femme de» et cela suffit. Le Général fut, à ce qu'on dit, touché par sa grâce. Et après ? Jamais, au grand jamais, il ne se serait vu attribuer un tel rôle à celle que les Français appellent - respect ou moquerie ? - «Tante Yvonne». D'autant que «Jack», l'homme le plus puissant du monde, n'a pas fait dans la dentelle : «Je suis le type qui accompagne Jackie Kennedy», dit-il en préambule de son discours au dîner officiel de l'Élysée.
Et pourtant ! Mme de Gaulle, dont le rôle traditionnel consiste, entre autres, à lui acheter, deux fois par an - hiver et été -, un costume au rayon grandes tailles du Bon Marché et à l'accompagner à la messe, à être une maîtresse de maison modèle, soumise, mais à la française, c'est-à-dire veillant au grain - cuisine et contrôle de l'emploi du temps, les messieurs sont si imprévisibles... La voilà donc, parce que «les temps changent» et que Mme Coty elle-même s'est fait photographier, une louche à la main, servant la soupe à son mari, devant une bouteille de Dumesnil, la bière de ménage... La voilà donc, Yvonne la secrète, Yvonne la sévère, promue, bombardée Première dame de France. La presse en a décidé ainsi...
Plus de cinquante ans ont passé... «Embrasse-moi (non, pas comme ça) sur la bouche !» C'est la première phrase que Valérie Trierweiler ait murmurée au président Hollande à la seconde où les photographes commençaient leur noria autour de lui, place de la Bastille.
Première dame ? Elle veut l'être. Elle le demande. Elle l'implore. Elle l'exige. Pour ce socialiste, que l'on croit encore mou, voire bonasse, ce n'est qu'un petit gage qu'il offre à «la femme de sa vie». Il est trop politique pour ne pas savoir que cet adoubement est tout sauf républicain, trop bien élevé pour ignorer que cet oubli de la mère de ses quatre enfants est tout sauf élégant. Mais quoi, après tout, il ne s'engage pas. Cette dame ne sera pas sa femme et le reniement est moins compromettant que le divorce. Cela, c'est ce qu'on peut dire «après». Après que le hasard eut mis sur sa route une ravissante actrice... La cote de popularité de François est au plus bas, le monde est à feu et à sang et lui, déguisé en motard, se fait piéger sur un scooter. Le Général avait raison : les temps changent !



19,90 €
En rupture de stock
EAN
9782262040642
Image non contractuelle